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Camille Rabineau

Work & The City - "Aux États-Unis, ils re-cloisonnent tout !" Mythe ou réalité ?

Published over 1 year ago • 5 min read

"Aux États-Unis, ils re-cloisonnent tout !"

Accompagner des déménagements de bureaux n'est pas aisé. Le changement d'habitudes, le sentiment de voir ses conditions de travail attaquées...tout cela produit des craintes, des réserves, parfois des oppositions virulentes.

Rien de plus normal face à ces bouleversements, qui peuvent être vécus comme imposés. À l'appui de ces objections, des arguments...plus ou moins fondés. Parmi ceux-ci, il y en a un qui revient : les opérations de réaménagement de bureaux qui reposeraient sur l'ouverture (passage en open spaces) seraient has been, car aux États-Unis, on remet des cloisons. Est-ce un mythe, ou doit-on écouter ces lanceurs d'alertes ? Nous creusons ici le sujet, de sorte à ce que si on vous oppose un jour cette idée, vous ayez la réponse :)

Bonne lecture ! Si vous n'êtes pas encore abonné à Work & the City et que ce contenu vous plait, c'est par ici :-)

Les open spaces dominent le bureau américain...et sont appréciés

Les américains ont tourné l'open space dans tous les sens. Plateaux "paysagers" ou cubicles, ces open spaces dont les bureaux ceints de cloisonnettes mi-hautes offrent une protection à la personne : ils en ont déployé les déclinaisons à grande échelle. À l'approche de l'an 2000, l'architecte Robert Probst estimait que ce sont près de 40 millions d'américains qui travaillaient dans des open spaces aménagés en cubicles.

Plus près de nous, l'université américaine Nazarene a conduit en 2019 une étude sur les conditions de travail au bureau auprès de 2000 salariés américains. Selon ces données, 79% des travailleurs de bureau américains travaillent dans des espaces comportant au moins une partie d'open spaces, qu'il s'agisse d'open spaces en flex office, d'open spaces avec bureau attribués ou de cubicles. Des chiffres corroborés par d'autres études.

Incroyable du point de vue français, mais vrai, les open spaces sont appréciés de leurs utilisateurs aux États-Unis. 74% de ceux qui sont en open-space avec places attitrées et 73% pour ceux qui n’ont pas de places attitrées se déclarent satisfaits de leur environnement de travail, un score à peine en deça de la moyenne (77%).

Les critiques qui demeurent envers les open spaces tournent autour d'une demande renforcée de calme, d'un espace dédié, d'équipements confortables...mais ni de cloisons, ni de porte. En dépit de ces critiques, les salariés américains n'aspirent pas à retrouver un environnement trop isolé ou trop calme.

Variété des espaces et "matrice des postures"

Les open spaces sont si répandus aux États-Unis que les chercheurs se penchent de près sur leurs impacts sur les salariés. C'est ainsi que l'étude de Ethan Bernstein et Stephen Turban a fait grand bruit en 2018, alors que leurs auteurs ont mesuré chez deux entreprises passant en open space une baisse de la communication en face à face pour lui substituer des communications numériques.

Aux États-Unis comme ailleurs, la pandémie de 2020 est venue rajouter une dose de complexité aux aménagements qui s'articulent autour des open spaces : l'enjeu d'optimisation des mètres carrés exclut de repasser vers des bureaux fermés, mais l'expérience du télétravail confiné a rendu les salariés plus sensibles au bruit et désireux de pouvoir passer des moments concentrés au bureau, même s'ils y viennent pour le plaisir de retrouver des collègues avant tout.

L'exemple du siège social de Linkedin est à ce titre intéressant : alors que le projet de réaménagement du siège de Sunnyvale fut percuté de plein fouet par le Covid, les responsables prirent le parti de la variété des postures et ambiances de travail plutôt que celui du taux d'occupation : " Nous nous sommes retrouvés dans l'impossibilité de savoir combien de personnes seraient en même temps au bureau. Alors nous avons décidé d'offrir la variété la plus large possible de solutions pour que les salariés puissent venir travailler." Une "matrice des postures" qui permet de s'affranchir de la dichotomie bureau fermé/bureau ouvert en venant créer une multitude de solutions pour retrouver de l'isolement dans un univers majoritairement ouvert.

Mon open space fermé dans un lieu partagé : le coworking en plein boom

À l'heure de l'après-Covid, les formules flexibles du bureau ont le vent en poupe aux États-Unis, qu'il s'agisse d'espaces de coworking ou de "bureaux opérés", c'est à dire une approche du bureau comme un service, qui permet aux entreprises de se dégager des contraintes de gestion liées au bureau tout en ayant une approche plus souple des mètres carrés.

Si cette offre tire son épingle du jeu aux États-Unis, c'est qu'elle "comble le fossé" entre des employeurs qui ne veulent plus gaspiller leur argent dans des mètres carrés inutilisés et des employés qui demandent des lieux pour se retrouver et sortir de chez eux.

Ce nouveau type de bureau brouille les pistes : les entreprises qui s'installent en coworking réservent le plus souvent des bureaux aménagés comme un open space..fermé sur la circulation, de sorte à disposer d'un environnement privatif et sécurisé, en dépit du fait que le coworking a fait sa renommée historique sur ses espaces collectifs flamboyants. Selon une récente étude de Cushman Wakefield et Wework sur le sujet, les utilisateurs passeraient plus de 60% de leur temps dans ces bureaux dédiés !

Si on est loin d'un retour du bureau fermé aux États-Unis et ailleurs, les déclinaisons du bureau "ni ouvert ni fermé" n'ont pas fini de s'inventer.

On a repéré aussi

🏢 Un exemple à suivre pour La Défense ? Le quartier de "Metro Tech" à Brooklyn, un centre d'affaires construit dans les années 80 pour rivaliser avec la Silicon Valley mais qui n'avait jamais vraiment percé, est en train de renaître de ses cendres sous le nom "Brooklyn Commons". Au coeur de la stratégie des opérateurs à la manoeuvre : un parc.

✨ Le cabinet Gallup et des chercheurs des universités de Pennsylvanie et du Minnesota ont démontré que les relations d'amitié au travail avaient de nombreuses externalités positives. Nous passons près de 9 ans de notre vie au travail : il est donc plus probable de se faire des amis au travail qu'à l'école ou dans notre quartier. La relation amicale au travail rend plus impliqué, les amis communiquent mieux et s'encouragent entre eux : que du bon pour l'efficacité et la rétention des talents !

🪧 "Je serai chez moi juste pour dormir" : la chroniqueuse du Monde Guillemette Faure publie un billet pince sans-rire qui nous rappelle qu'en cette période de crise énergétique... le bureau donne accès à un lieu chauffé "gratuit" pour les salariés. Le tout avec réserves de fournitures, possibilités d'impression, et pourquoi pas un collègue sympa pour le café. Je vous ai déjà parlé de cet article sur le vol de fournitures au bureau ;) ?

Camille Rabineau & l'équipe de Comme on travaille

Nous sommes Comme on Travaille, consultantes et facilitatrices spécialistes des nouveaux modes & espaces de travail. Nous accompagnons les entreprises déterminées à faire de leurs projets d'aménagement des projets humains, en utilisant le co-design et les outils de l'intelligence collective. Nous sommes les bonnes fées qui viennent mettre du lien et emmener les équipes dans des projets complexes, souvent mal perçus au départ.
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Camille Rabineau - Comme on travaille - camille@commeontravaille.fr

Camille Rabineau

Camille Rabineau fondatrice de Comme on travaille

Urbaniste, experte des nouveaux espaces de travail, je partage dans ma newsletter Work & the City des perspectives sur l'évolution du bureau, des modes de travail et leurs impacts sur la ville.

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